22/07/2012 Tyrosse: "Naissance de Manuel ESCRIBANO"

25/03/2014 17:54

22/07/2012: TYROSSE, LA NAISSANCE DE MANUEL ESCRIBANO

Dans la moiteur estivale de la petite ville de Tyrosse , ce 22 juillet 2012 est et restera une date historique pour l’aficion. En effet c’est au centre du ruedo de cette petite bourgade Landaise, que le grand maestro José Pedro Prados « El Fundi » fera ses adieux  à l’aficion du Sud Ouest.

Les organisateurs ont mis les petits plats dans les grands. Quelle ganaderia choisir pour l’événement ?  Bien sur les fauves de Zahariche, pain quotidien de la carrière du torero Madrilène s’imposeraient  comme une évidence. On peut aussi se dire que comme cadeau d’adieu, l’impasse sur les Miuras serait plus appropriée. Recréer le cartel des petits princes de Madrid (El Fundi, El Bote et Joselito) est loin d’être évident. Mais il est encore possible de retrouver avec nostalgie les noms d’El Fundi et Joselito une dernière fois au cartel. L’un torero, s’en allant vers une nouvelle vie, l’autre jeune ganadero commençant la sienne.

 ("El Fundi", Tyrosse: 22/07/2012)

 

En toute évidence, le matin de la corrida  ceux qui n’ont pas encore le fameux sésame se pressent assurément et formellement  sur la « taquilla » afin de ne manquer sous aucun prétexte la dernière et définitive envolée de  l’Aigle de Fuenlabrada.

 L’intérêt pour cette course est d’une telle intensité, que l’on en oublierait presque les deux autres piétons qui accompagneront le Maître.

Afin de se rafraichir la mémoire, voici le cartel du 22 juillet 2012 à Tyrosse : paséo à 18h ; « El Fundi » (Despedida), Ivan Fandiño et Manuel Escribano devant du bétail de Tajo de La Reina, propriété du maestro Joselito.

Lorsque retentissent « clarines y timbales », un des trois matadors ne sait pas encore une chose.  Dans son traje blanc teinté de rose pâle et brodé d’argent, il ignore donc que cette tarde sera à la fois tragique et mémorable,  qu’il repartira de la placita en ambulance certes, mais tel un héros blessé  emportant avec lui les clés de la ville et une partie du  cœur de chacune des personnes  présentes ce jour là.

Son nom : Manuel Escribano Nogales plus connu sous le nom de Manuel Escribano. Natif de Gerena (province de Seville),  ce grand blond aux yeux d’un bleu perçant et au physique Hollywoodien  reste peu connu du grand public. Pourtant loin d’être novice dans la profession,  il prit  son alternative en 2003 en Aranjuez, la mala suerte le poursuit inexorablement le propulsant  peu à peu  dans les profondeurs de l’Escalafon .

 Ces dernières années,  une dizaine de contrats dans des arènes de troisième catégorie remplissent  la panse du jeune torero à l’appétit pourtant vorace. Comme tous ceux d’ailleurs  qui un jour, décidèrent  de se « lancer dans cette  aventure un peu folle » (Alain Montcouqiol : Reportage,  « Ombre et Soleil sur l’Arène » - Producteur J.L Burgat-Canal+-1989) : devenir matador de toros.

Si je m’attarde sur cette corrida du 22 juillet 2012, c’est tout simplement parce que longiligne et élégant dans son habit blanc, lorsque  le Gerenois foule le sable landais il a inévitablement « la gana » et l’envie de démontrer au peuple Français ainsi qu’à  toute l’aficion qu’elle peut  et doit compter avec lui.

 

 

Il a de plus dans son répertoire un atout, et non des moindres : il pose les banderilles. Il les plante bien et le garçon depuis ses débuts en piquée en décembre 2001 a acquis une connaissance précise des terrains. C’est pourtant lors du second tiers que le taureau  de « Joselito » va de ses cornes pénétrer les chairs du frêle torero à l’habit blanc.

 

Malgré la douleur physique et morale, le « pundonor » prend le dessus sur un détour par l’infirmerie. Peu à peu le bel habit blanc teinté de rose pâle se souille de sang.  En l’espace de quelques secondes, on bascule du spectacle à la tragédie qui ne nous appartient plus. Le combat continue en deux face à face. Manuel Escribano contre le  fauve et le torero face à l’Homme ; l’Homme  le sait « chaque douleur est une mémoire »*, tout comme le torero  sait que chaque coup de corne est aussi une mémoire.

 

            

              (Manuel Escribano, blessé à "Porta gayola": Tyrosse, 22 Juillet 2012)

 

 

L’Andalou reviendra donc  en piste sous le regard admiratif de l’aficion ; alors  vêtu du simple "chaleco"  et d’un jean il se dirige intrépide, d’un pas ferme vers la porte du toril sous les yeux médusés d’un public tout acquis à sa cause. Cet oublié des cartels devenu soudainement  le héros de tout un peuple, se fera bousculer à plusieurs  reprise jusqu’à  frôler  la correctionnelle lors de la « porta gayola ». Qu’importe s’il eut du mal à expédier l’animal outre tombes ; l’oreille tomba comme une évidence du palco présidentiel. En ce 22 juillet 2012, Manuel Escribano Nogales avait gagné son pari : ne pas laisser indifférent et forcer le respect.

 

Lorsqu’il revint en juillet 2013, c’est une « figura » que les télévisions étaient venues filmer. Le 22 avril en lieu et place du Juli blessé, il mit tout le mundillo d’accord lors de la feria de Seville. 

 

 

 

 

Pourtant dans le petit patio des arênes de Tyrosse, rien n’avait changé jusqu’au choix de l’habit, identique en tout point  à celui étrenné un an auparavant. En 2014 il sait depuis l'année passée où se trouve La Capilla où se trouve la Macarena. Cette fameuse Vierge Sevillane qui une larme perlant sur sa joue invite le maestro à exorciser ses peurs. Cette Vierge des toreros qui semble pencher sur  ces âmes si pures qu'elles donneraient leurs vies pour être là agenouillées devant un Christ du Gran Poder, une Macarena quelque part, ailleur...demain.

 Le visage érigé vers les cieux,  esquissant un léger sourire, on pouvait à ce moment deviner les pensées qui assaillaient Manolo Escribano. Un an jour pour jour,  dans une introspection qui n’appartient qu’à ces Hommes vêtus de  lumières, il devait non sans nostalgie repenser à ce 22 juillet 2012.

 

(Tyrosse, 21juillet 2013).

 

 

Un an quasiment jour pour jour, revenants de ses premières amours,  il n’était plus l’anonyme du cartel mais bel et bien celui pour lequel ceux qui n’avaient pas le fameux sésame s’étaient pressés  le matin devant la taquilla, afin de ne manquer sous aucun prétexte la venue de l’ange au "Chaleco" blanc et au jean délavé…Ce 21 juillet Manuel Escribano termina le conte qu’il nous avait narré : mais cette fois, il y mit un point final en signant sa prestation d’une sortie en triomphe ; une manière de nous prouver que ce qui s’était passé le 22 juillet 2012 n’était pas un songe, mais bel et bien une réalité : Manuel Escribano Nogales, de Gerena,  province de Seville est un grand Homme et un immense Matador:  En une annéé il est passé de l'ombre à la lumière!...

 

      (Nouveau succés dans la lumière et même sourire empreint d'humilité: TYROSSE/2013)

 

 M. Vargas

*Citation: Eric Fottorino.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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